Olivier Tri

Expert RH | Ancien Directeur des Ressources humaines

Olivier Tri

Olivier Tri est un expert en ressources humaines avec un parcours professionnel riche et diversifié. Ingénieur de formation, il a commencé sa carrière en tant qu’ingénieur commercial avant de devenir manager d’équipes techniques.

Fort de cette expérience, il a ensuite rejoint la fonction RH il y a une vingtaine d’années. Il a terminé sa carrière en tant que Directeur des Ressources Humaines (DRH) d’une entité d’ingénierie en charge des modifications sur les centrales nucléaires. Son expertise et son expérience font de lui un interlocuteur privilégié pour aborder les questions relatives au harcèlement au travail et au rôle des RH dans sa prévention.

Dans cet entretien exclusif, Olivier Tri, expert en ressources humaines, partage son analyse et ses conseils pour faire face à ce défi majeur.

|

L’action qui touche le salarié est celle qui fait progresser les choses !

Interviewer : Comment les RH peuvent-ils être les acteurs clés de la prévention du harcèlement ?

Olivier Tri :

Le rôle des RH est fondamental. Si l’entreprise est avant tout un objet économique, pour atteindre ses objectifs, elle doit s’appuyer sur des salariés engagés. Le harcèlement est un frein à cet engagement. Les RH doivent donc obtenir cet engagement en levant les freins et en favorisant un environnement de travail sain. Il est essentiel qu’ils légitiment ce rôle auprès de la direction, car la prévention du harcèlement peut nécessiter des investissements qui ne génèrent pas de bénéfices immédiats. Les RH doivent donc négocier avec la direction et démontrer la rentabilité à long terme de ces actions. Si nous considérons le harcèlement comme une forme très dégradée des conditions de travail, celui-ci étant interdit par la loi, il est impératif de ne pas le laisser se développer.

 

Interviewer : Quels sont les freins qui empêchent les RH d’agir efficacement contre le harcèlement ?

Olivier Tri  souligne plusieurs points clés :

    • Le temps consacré à la prévention peut être perçu comme une perte de productivité.
    • Les actions de prévention qui peuvent confronter des réalités différentes.
    • Une contradiction apparente entre exigence de productivité et harcèlement.
    • La perception des RH vus comme des obstacles à l’atteinte des objectifs de l’entreprise.
    • Les difficultés financières et à faire accepter les actions par la direction.L’isolement social et les discriminations.
    • La mauvaise perception des études sur les risques psychosociaux (RPS) par certains managers.

Interviewer : Mais quels sont les risques si les RH ne prennent pas de mesures contre le harcèlement ?

Olivier Tri :

    • Ne pas protéger l’entreprise vis-à-vis de la loi.
    • Détériorer l’engagement, le climat social et, à terme, la productivité, augmenter le turn over…

Interviewer : Comment les RH peuvent-ils détecter les premiers signes de harcèlement ?

Olivier Tri :

Je recommanderais d’être attentif aux facteurs de risques psychosociaux (RPS), car le harcèlement peut en être une conséquence. Il faut organiser un canal de remontée directe pour les salariés qui se sentent en situation de harcèlement, par exemple un numéro d’appel. Il est aussi essentiel d’être à l’écoute du terrain et présent auprès des équipes, et de faire savoir que chaque salarié peut signaler une situation de harcèlement.

Interviewer : Comment construire une politique de prévention du harcèlement qui fonctionne vraiment ?

Olivier Tri :

Une politique efficace doit s’articuler autour de trois axes :

  • Éliminer les causes possibles de harcèlement, en sensibilisant notamment aux RPS et en formant le management.
  • Mettre en place une politique de sensibilisation pour que chacun soit conscient que le harcèlement est interdit par la loi et qu’il peut prendre différentes formes. Il est important de poser des limites. mettre en place des dispositifs de signalement et en définissant des mesures claires.
  • Traiter le harcèlement lorsqu’il se produit, en prenant en compte l’accompagnement de la victime et s’il y a lieu en prenant les sanctions adaptées envers le harceleur.Il est important que cette politique soit adaptée au contexte de chaque entreprise.

Il est important que cette politique soit adaptée au contexte de chaque entreprise.

Interviewer : Pourquoi la formation et la sensibilisation sont-elles indispensables ?

Olivier Tri :

La formation et la sensibilisation sont primordiales pour faire progresser les choses. Elles permettent de prendre conscience des écarts entre les bonnes pratiques et celles qui sont mises en œuvre. La formation doit être obligatoire pour les managers et les salariés, pour qu’ils sachent comment agir face à des situations difficiles sans risquer de tomber dans le harcèlement.

Interviewer : Comment impliquer tous les collaborateurs ?

Olivier Tri :

  • Utiliser un baromètre pour évaluer les pratiques de l’entreprise et la perception des salariés.
  • Restituer les résultats à l’ensemble du personnel.

  • Organiser des groupes de travail pour que les salariés proposent des améliorations.

  • En ce qui concerne le harcèlement sexuel, faire prendre conscience du continuum entre le sexisme bienveillant et violent.

  • Souligner que le harcèlement est interdit par la loi.

    Des initiatives qui ont fait leurs preuves ?

  • Les actions menées dans le cadre de la lutte contre les risques psychosociaux (RPS).

  • Les actions de lutte contre le sexisme, qui peuvent s’étendre à la lutte contre le harcèlement moral et sexuel.

  • Une progression significative dans une entreprise où des actions ont été menées sur deux années consécutives. Il est important de mettre en place des politiques mais l’action qui touche les salariés est celle qui fait progresser les choses.

Les conseils d’Olivier en tant qu’ancien DRH :

  • Les valeurs que l’on porte en tant que RH nécessitent parfois d’être défendues, et les enjeux RH, essentiels pour l’entreprise, doivent prendre toute leur part, au même titre que les enjeux industriels et financiers.
  • Agir sur le long terme, car les actions RH prennent du temps pour être efficaces tout en étant soucieux de dégager des « victoires rapides ».
  • Avoir conscience que les salariés ne peuvent s’engager si les conditions de travail sont dégradées et notamment si l’entreprise n’est pas vigilante concernant le harcèlement.